besoin naturel

Toujours dans le cadre de notre weekend en amoureux, nous voilà partis dans la forêt de je ne sais plus où, sur les pas du vieux chêne de saint Jean. Il fait frais mais beau, on se balade, seuls au monde entre arbres en fin de vie, bosquets animés par les animaux qui y habitent, pépiements des oiseaux et traces de chevaux au sol. Pou s’amuse à me faire peur, on essaie de suivre le chemin parfois dissimulé et je me mets à l’arrêt comme un grand veneur à chaque bruit de sanglier mangeur d’hommes (et de femmes) que j’entends imagine hors du sentier. Dans un conte de fée, j’aurais des couettes et un panier en osier. Mais là, c’est le drame. J’ai envie de faire pipi. J’avais déjà envie quand on est parti mais je me suis dit (en toute logique) que l’envie allait disparaitre. Sauf que là…c’est la cata. Je suis incapable de souiller la nature comme ça (j’ai surtout hyper peur de me faire grignoter les fesses par un quelconque animal affamé (ben vu la taille desdites fesses, faut être affamé pour s’y attaquer hein)). J’peux pas envisager de me retrouver cul nu dans la forêt pi Pou pourrait me voir ou m’entendre, pi on n’a croisé personne depuis 1h qu’on marche mais suffirait d’un couple de randonneur pi avec tous ces drones qui traînent, de là à ce que je me retrouve sur le net….Nan, je vais prendre sur moi. Pi on doit plus être loin du retour là non ? Ah ben pile poil sur le panneau, il nous reste une bonne heure encore. « Pou, j’ai envie de faire pipi ». « Ben fais le » « nan, j’peux pas » « ben fais pas » « mais je peux plus tenir » « ben fais pipi » « tain, t’es con parfois » « ben là sans dec, on est les deux seuls êtres vivants dans cette forêt, y’a des arbres partout, les oiseaux sont les seuls qui pourraient assister au truc alors tu veux, tu fais hein » « ahh, tu vois les oiseaux vont me voir ! ». On avance encore, Pou me raconte une ânerie et je ris. Je ris trop, je ne tiens plus !

« Pou avance tout seul, je te rattrape. Euh, mais avant, prends mon sac et mon manteau steuplé ». Pou s’éloigne. Je gambade hors du sentier, mon paquet de kleenex à la main, je me dirige vers un trou d’eau en contre bas, je glisse dans la boue et manque de finir le cul par terre, ça me fait rire. Faut pas que je rie. Je me baisse de façon à être cachée par un bosquet d’arbres un peu plus denses que les autres, je vérifie que je ne peux absolument pas être vue ou entendue par Pou et là, alors que je me résous à me résoudre à laisser parler mon côté animal, j’entends « Pouse, monde en vue, fais gaffe ». En deux secondes, ma vessie se bloque, je saute au-dessus de la boue et me retrouve sur le chemin … complétement vide ! Le silence uniquement brisé par l’éclat de rire de l’aut’ con que j’ai épousé un jour de faiblesse mentale. « Pov tache va ! » « Ahahaha, t’es revGaucheenue, je savais que tu marcherais ! Promis, je ne le referai plus ». Je n’ai d’autre choix que de le croire, je ne peux plus tenir une seconde de plus. Je retourne dans mon endroit à moi et ce qui doit être fait est fait. Je reviens sur le chemin, digne, drapée dans mon honneur un peu bafoué et je rejoins Pou. « Alors c’était pas difficile tu vois ? » « Shhhhttt, il ne s’est rien passé. Tu te tais on n’en parlera plus jamais ».

De fait, vous aussi, je compte sur vous. Pas un mot. Jamais. Il ne s’est rien passé. Ce qui est arrivé dans la forêt reste dans la forêt.