jour 3, jour de honte

J’ai mis du temps à revenir vers toi avec le jour 3 de ma virée copenhagoise car elle ne me présente pas à mon avantage. Je vais donc être rapide et je te demanderais de lire ces lignes comme tu lirais celles d’un roman : en te laissant porter par l’histoire, sans juger mais surtout en laissant le bénéfice du doute à tous les protagonistes. Je t’ai laissé(e) après une soirée tapas lors de laquelle j’ai découvert avec étonnement que les gens de la table à côté de la notre parlaient en anglais à la serveuse alors que tous étaient copenhagois. Leur idiome guttural leur est donc si difficile à assumer qu’ils préfèrent l’anglais ? Bref, on part au dodo, les oreilles pleines d’Iglesias, Gispy kings et autres Shakira (non, c’était pas caricatural comme ambiance..)

Le lendemain matin, nous rassemblons nos affaires, nous prenons un petit dej tout aussi copieux bien qu’un peu moins qualitatif que la veille (sarass le pain viking de dimanche…) étant donné que là, c’est acté, on n’est pas capable de gérer correctement le passage par la halle au manger d’à côté ! Et hop, en route vers les consignes, notre billet illimité encore valable quelques dizaines de minutes..

Consigne bim, décidage d’aller faire un peu de shopping bim, excitation de faire la croisière touristique bim aussi. En premier lieu on se fait le vérifiage qu’il nous faut prendre un tit’ métro et finir en bus (fait encore froid sa mère) pour nous rendre où le bonheur nous attend. Et là, c’est le drame. Dans les escaliers qui nous amènent au métro, nous prenons conscience que nos passes 24h, ne sont plus valables « bon, les filles, ch’ais pas vous, mais moi, je perds pas un quart d’heure à acheter un billet. Je fraude. De t’façons, ici pas de tourniquet ni de controleur » « nan, mais non, spa possib, on peut pas faire ça, blabla honnête blabla enfer blabla honte blabla pour quelques centimes » Mes potentielles co-détenues s’insurgent contre mon idée déviante et je leur explique qu’on a (presque) toutes les trois 40 ans et qu’elles peuvent aller se prendre des tickets. J’ten foutrais de la probité moi : deux secondes après, nous sommes toutes les trois en cavale, tous les flics copenhagois prêts à nous tomber dessus, nos augustes derrières posés dans un bus sans le moindre ticket valide ! Pour en arriver là, nous avons une fois de plus bénéficié de la gentillesse serviable d’un autochtone prêt à louper son bus pour nous indiquer où prendre le notre et pire que pire, en montant dans ledit bu (ouais, je crois te l’avoir déjà dit, je n’aime pas prononcer les S de fin de mots) j’ai même montré une sale patte blanche incarnée par le billet que je savais périmé à notre souriant chauffeur. Pour information et pour la postérité, mes co-voleuses (qui avaient déjà partagé avec moi au resto basket, je vérifierai mais je crois t’avoir déjà conté cet incident) toutes outrées de mes méthodes aient elles été, se sont tout de même mises d’accord « si on se fait arrêter, on ne parle même pas anglais hein »….J’aurais honte si j’étais elles..

Bref, déjà que le dimanche tout est fermé, notre shopping est tombé à l’eau en ce lundi pendecôtal. Nous nous sommes donc concentrées sur la croisière très agréable jusqu’à ce qu’arrive l’heure de nous rendre à l’aéroport. Une fois nos bagages récupérés, nous nous installons confortablement dans l’ équivalent danemarkois du RER, c'est-à-dire, propre, avec des gens qui sourient, des emplacements pour brancher ses écouteurs, recharger son portable et..tiens, ça tombe bien, des toilettes. Poussée par une envie irrépressible, je dis donc aux filles que je vais faire un tour aux commodités. Je ne sais pas trop où c’est mais bon, on a 40/45mn de trajet devant nous donc ça devrait aller pour un petit pipi. Je passe une première porte, une autre, des gens, des wagons de vélos, des indications vers les toilettes, des wagons de distributeurs de mam et de glou, encore des portes et bim, toilettes. Pour un peu, je n’y croirais pas (pour un peu, mais c’est quoi cette expression… ?) tellement c’est propre et spacieux. Je ferme la porte et cherche le verrou. Ma vessie, motivée à l’idée de se vider commence à me faire remarquer qu’elle est au bout du rouleau. Oui, une minute. Je cherche toujours le verrou et me dis qu’une fois fermée la porte doit se verrouiller. Mais alors quand on sort il faut laisser ouvert ? Et si je m’assieds et que quelqu’un entre ? Non, je n’y arriverai pas, trop d’insécurité pour se laisser aller tranquillement, tant pis j’attendrai d’être à l’aéroport. Je repars donc vers nos places alors que le RER s’arrête dans une station dont je n’entends pas le nom . Je passe des portes, des miams et des glous, des portes, des vélos et …merde mais elles sont où ? C’était là non ? Je jette un œil dehors, et je vois ma Rourou et ma Lemon, sur le quai en train de me faire signe de descendre vite, mes valisDroitees, blousons et autres affaires dans les bras ! Je cours et je saute les rejoindre « mais qu’est ce que vous foutez ? » « ben on est arrivées » « ben comment ? » « Ben ca a été plus rapide que prévu… ». Et là, j’ai la chance de ne pas réaliser tout de suite que j’ai failli me barrer, toute seule, sans téléphone, sans papier, sans argent, sans rien de rien jusqu’à Malmö ! En ne sachant même pas qu’on avait atteint l’aéroport ! J’aurais trouvé le verrou des pipiroom, je ne pourrais pas vous écrire aujourd’hui, je serai certainement en geôle, quelque part entre la Suède et le Danemark, emprisonnée pour sans papierisation, vagabondage, fraude au ticket, immigration illégale ! Midnight express quoi ! Tatatatada tadadadata da, Tatatatada tadadadata da, tadada dadada dadada dada ! Cette angoisse !!

Bref c’était cool le Danemark, en gros, ils sont charmants, homo, confiants, plein d’espace mais on a risqué nos vies pour un reportage, nos âmes pour frauder, notre nationalité pour un pipi…

Dans 15 jours les 2/3 d’entre nous repartent en vadrouille vers la contrée paysbasienne. Je vous en dirai des nouvelles…